Pierre ZIMMERMANN, coach de l’équipe Française championne du monde à la Coupe du Monde de la Boulangerie 2008, nous livre ses secrets pour se préparer aux concours de haut niveau.
« Les concours sont le sel d’une carrière professionnelle. »
Cela va sans dire, la participation à un concours d’envergure mondiale en boulangerie demande une préparation intense. Outre la connaissance approfondie de ses produits, il faut savoir travailler sur soi, accepter aussi bien l’échec que la victoire. Ce travail ne peut se faire sans une personne extérieure, le coach.
Vous avez non seulement une expérience de coach de l’équipe française championne du monde en 2008 mais aussi de candidat gagnant à la Coupe du Monde de la Boulangerie 1996. Selon vous, quels sont les principales étapes à respecter pour se préparer à des concours de haut niveau comme la Coupe Louis Lesaffre ?
Tout d’abord, il est très important d’avoir une connaissance approfondie du règlement. Il est donc conseillé de s’entourer d’une ou plusieurs personnes ayant déjà participé à ce type de concours. Ensuite, il faut adopter une stratégie de séduction des produits à présenter aux membres du jury. En effet, il faut trouver les produits en accord avec le règlement qui vont être les plus accrocheurs et permettront de gagner des points sur la présentation, la texture, le goût …
Sur cette base, il faut sélectionner et réaliser le double de produits exigés par le règlement. C’est à ce moment qu’apparaissent les produits à retenir pour la compétition. Demander un avis extérieur permet de guider plus facilement cette sélection.
La suite de la préparation a pour objectif d’affiner les recettes choisies. Pour cela, une seule méthode : de nombreux essais et un débriefing systématique. C’est à ce prix qu’on acquiert les automatismes qui permettent de gagner du temps : on peut passer d’un programme complet de 20 heures, pour au final, tenir dans les 8 heures de la compétition. Cette phase d’affinage est assez longue.
Combien d’entrainements sont nécessaires pour bien préparer une équipe et quel est le but de procéder à un débriefing systématique ?
A noter qu’il faut au minimum de dix entraînements individuels, en alternant avec les entraînements en équipe.
Après chaque essai, il est vital, pour la préparation et la suite des entraînements, de procéder à un débriefing, représentant 30% du temps en commun. Il s’agit de faire analyser le travail réalisé par quelqu’un d’extérieur à l’équipe. Chaque produit doit être noté selon les critères du règlement (nombres de pièces, aspect, cuisson, texture, goût…). C’est le rôle du coach, et éventuellement, d’une troisième personne. A travers les critiques et remarques perçues lors de cette étape, de nombreuses idées positives et constructives émergeront.
Le débriefing a pour but de guider l’entraînement suivant, mais aussi de trouver les arguments et mots-clés pour défendre ses produits. Il doit être écrit pour avoir une trame d’évolution du travail de l’équipe. Cela permet d’affiner la stratégie et le travail sans refaire les mêmes erreurs.
Concernant le savoir-être de l’équipe, quels sont les principaux points à travailler ?
« Le savoir-être représente la façon de se conduire, de s’habiller, de l’attitude à adopter lors du concours et aussi vis-à-vis des médias. »
Il faut tout d’abord entretenir un bon esprit d’équipe et se soutenir dans l’organisation globale. En effet, il n’y a de la place que pour une seule équipe gagnante, chacune doit donc se préparer à gagner mais aussi à perdre. L’équipe ne peut trouver une vraie cohésion que si elle est encadrée de façon durable par le même professionnel.
La notion de fair-play est aussi très importante dans l’attitude à adopter lors d’un concours d’une telle envergure. Il faut avoir envie de partager pour s’enrichir du talent de chacun et ne pas hésiter à prendre des contacts.
Après la compétition, cet enrichissement relationnel est souvent la seule chose qui reste permettant ainsi de continuer à progresser et d’offrir d’autres possibilités de carrière.
Quelles sont les notions de « communication » à travailler avec une équipe ?
Premièrement, les membres de l’équipe se doivent de travailler la gestion des médias. Dés lors où elle s’engage dans un concours d’exception comme la Coupe Louis Lesaffre, il faut s’attendre à ce qu’elle soit sollicitée par les médias et faire preuve de disponibilité. Avant la compétition, il ne faut pas trop en dévoiler et garder l’effet de surprise pour la notation du jury. Cela permet souvent de gagner des points. Il faut donc trouver un juste équilibre pour donner de la matière aux journalistes. (Développer le profil des candidats, mettre en avant ses sponsors, parler du concours et de ses spécificités) et ne pas hésiter à leur remettre des produits de présentation.
Deuxièmement, il faut soigner son apparence et la présentation des produits. Cela passe par la façon de s’habiller (uniforme, costume) tout en gardant une similarité qui identifie une équipe avec un cachet national. Afin de mieux convaincre le jury de la qualité des produits réalisés, définissez deux à trois mots clé pour chacun d’entre eux. Il faut bien les retenir, pour ne pas les oublier lors de la présentation au jury, d’autant plus que ce moment est toujours un moment d’émotion, voire de grand stress.
Crédits photo : Paul Zimmerman - Studio Pygmalion